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OBI-WAN KENOBI (critique)

Dernière mise à jour : 24 nov. 2022

Longuement teasée, retardée, mutée, cette mini-série sur une des pierres angulaires de l’univers Star Wars vient de toucher à sa conclusion. Ewan McGregor retrouve son personnage d’Obi-Wan Kenobi pour parfaire la narration entre les épisodes III et IV. Réussite ou énième déclinaison sérielle servant à remplir le catalogue de la plateforme Disney+ ? Réponse de Jofrey La Rosa sur PETTRI.

À la fin de La Revanche des Sith, Obi-Wan confiait Luke à Owen et Beru sur Tatooine, promettant toutefois de garder un œil sur lui en exil sur la planète désertique. Leia était quant à elle confiée aux Organa sur Alderaan, tandis que tous les Jedi étaient pourchassés par les forces armées de l’Empire et qu’Anakin devenait Darth Vader. On retrouvait les jumeaux de chaque côté de la galaxie, dans l’épisode IV, alors que le premier répondait à l’appel de détresse de la seconde, prenant contact pour la première fois avec un Obi-Wan vieillissant (interprété par l’éternel Alec Guinness). Mais les 16 années qui séparent les deux volets de la saga restaient inédites. Dès la fin de la prélogie, et plus encore depuis le rachat de Lucasfilm par Disney, un film puis une série centrés sur Obi-Wan Kenobi ont été évoqués. C’est finalement cette mini-série avec Ewan McGregor qui voit le jour, menée à bien par la réalisatrice Deborah Chow, sur un script de Joby Harold, assisté de Hannah Friedman et même la tête pensante de chez Pixar Andrew Stanton. Mais c’est un projet hérité de passes narratives de la part de Stuart Beattie (Collateral, Snow White & The Huntsman) et Hossein Amini (Drive, The Two Faces of January). Du coup, beaucoup de monde crédité au scénario de cette mini-série, pour une régularité narrative qui ressemble à ce patchwork de scénaristes : ça va dans tous les sens – et pas forcément le bon.


Qu’est-ce que vaut concrètement cette série Obi-Wan Kenobi ? Compliqué de répondre à cette question épineuse. Jusqu’alors, Disney+ et Lucasfilm, ça ne fait pas des étincelles, que ce soit avec The Mandalorian ou pire, la série Boba Fett. Au premier abord, c’est une plutôt belle surprise, le ton étant réellement bien géré dans un premier épisode jouant à la fois sur des sempiternels codes starwarsiens et appliquant une décrépitude des âmes, de l’esthétique, du ton, inhérente à l’époque charnière dépeinte. C’est plutôt bien foutu, prend son temps pour qu’on retrouve notre personnage préféré de la prélogie, installe d’autres choses, et a même l’intelligence de nous faire sortir de Tatooine de temps en temps, parce qu’on commençait à se demander si c’était la seule planète digne d'intérêt pour les créatifs de Lucasfilm. Mais on se rend enfin sur Alderaan, la planète-mère des Organa, les parents adoptifs de Leia, qu’on retrouve à désormais 10 ans, aventureuse et un peu pimbêche, mais habilement insérée dans la narration comme motivation pour Obi-Wan à repartir à l’aventure – malgré les Inquisiteurs qui traquent les Jedi partout dans la Galaxie. En effet, Leia se fait enlever. Son papa demande donc à Kenobi de reprendre les armes pour la retrouver et hop on se barre de Tatooine. Ouf. On y reviendra que dans le sixième et dernier épisode, après avoir visité quelques autres systèmes, plus ou moins intéressants visuellement, dans des épisodes plus ou moins pêchus.

Ce qui marque surtout dans ces six chapitres, c’est la propension qu’ont les gens en charge de rendre monotone leur aventure, contraints par le principe même de leur série : combler un trou narratif entre deux trilogies déjà bien fournies, engoncés derrière ce qu’ils ne peuvent pas faire, et surtout par le manque d’enjeux. Le spectateur sait exactement ce qui peut se passer, qui peut mourir ou pas, pour qui il faut s'inquiéter, et surtout qu’il ne faut pas trop s’attacher aux nouveaux personnages, qu'ils soient des alliés ou des ennemis, avec un rôle narratif temporaire. Du coup, c’est un peu ennuyant pour tenir 5h30 devant une histoire dont on sait déjà la résolution, qui plus est parce que c’est un retour à la situation initiale. De fait, alors même que le ton est plutôt on point, il manque un grain de folie, un certain intérêt, ce qui a tendance à plomber le tout, alors même qu’on est tout de même un peu au-dessus des autres productions Star Wars sur Disney+.


Premier défaut notable, c’est le manque de punch dans la réalisation, pourtant très correcte. En effet, Deborah Chow, réalisatrice de télévision à qui on doit des épisodes de Reign et de Mandalorian, s’occupe ici de l’ensemble des épisodes, tournés à la manière de ses comparses dans le ‘Volume’, ce mur d’écran permettant une incrustation en direct des décors numériques. Un ponte de la lumière s’occupe du poste de chef opérateur : Chung Chung-Hoon, le directeur de la photographie de Park Chan-Wook (Old Boy, Stoker) mais aussi de Last Night in Soho ou Uncharted. Pourtant, son style affirmé et léché fait souvent place ici à une douceur diffuse qui vient davantage ternir l’image que réellement la magnifier ou la différencier des autres productions Lucasfilm. Bien souvent, on ne voit pas grand chose, c’est tout gris, pas beau caca doigt. Dommage donc… Pareil pour la musique, signée Natalie Holt (Loki), qui fait parfois la blague, mais qui fait souvent de la non-musique, d’autant plus qu’on parle de Star Wars, merde ! Rien de flamboyant, de grandiose, pas même le thème simpliste que John Williams a enfin décidé d’offrir à Obi-Wan…

Mouarf… Le truc cool que cette série montre bien (puisque c’est souvent sombre), c’est la véritable révolution à l’œuvre depuis (le génial) The Force Awakens : les sabres sont désormais lumineux au tournage, ce qui leur permet d’éclairer les comédiens, les décors, dans des tons colorés marqués, qui se mélangent parfois. Et le rendu est d’autant plus réaliste qu’il est incroyable. Ceci étant dit, les cadres en caméras portées de Chow et le manque d’enjeux marquent toutefois l’ennui qu’on a devant cette série, qui ose pourtant quelques choses intelligentes et (du coup) intéressantes, notamment les flash-backs sur l’ordre 66 en ouverture, celui sur la relation Anakin/Obi-Wan (avec toutefois un Hayden Christensen qui a vieilli…), des beaux moments avec Darth Vader, mais un peu concon quand on y repense (la Force et l’évasion du vaisseau de réfugiés) ou les combats successifs avec son ancien maître. Il manquerait d’ailleurs un petit combat au sabre opposant Reva, une Inquisitrice revancharde, et Obi-Wan, entre ses deux combats contre Vader, pour réellement montrer l’évolution de notre héros, mais bon… Ah oui, et tant que j’y suis sur Reva, très bien interprétée par Moses Ingram (The Queen’s Gambit, Ambulance), son arc narratif est non seulement ultra-prévisible, il est un peu forcé sur la fin, permettant de mettre de la lumière sur Owen et Beru, dont l'interprète du premier est devenu une star entre temps : Joel Edgerton (Warrior, Exodus).


Obi-Wan Kenobi est donc une petite déception, qui a ses hauts et ses bas. On est bien loin du niveau de ce qu’aurait pu être un simple film de 2h. Là on sent le temps s’étirer, dans des épisodes fillers (horribles épisodes 2 et 4), alors qu’on en a que six. Pire, c’est parfois ridicule (le kidnapping de Leia par exemple) et c’est souvent oubliable au mieux, malgré une direction artistique claire (certes avec ses défauts) et un Ewan McGregor qui livre une prestation solide, sûrement parmi les meilleures de la saga entière. Couci-couça donc…

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