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LIFE IS STRANGE : TRUE COLORS (critique)

Déjà le troisième épisode (plus un spin off développé par Deck Nine, à l’œuvre ici aussi) pour cette formule made in Dontnod ayant vu le jour en 2015. Des procédés narratifs convenus, des personnages assez lambdas, des enjeux dramatiques minimes… font étrangement de ce jeu de la vie (vous l’avez ?) un petit coup de cœur. Voici son histoire. TUDUM.

Moins belle la vie

Après avoir vécu 8 ans en centre, il est temps pour Alex Chen, notre héroïne, de rejoindre son frère aîné installé dans la petite bourgade minière de Haven Springs, dans le Colorado. À la recherche de leur père parti durant leur adolescence, Gabe a en effet décidé de se ranger et de mener une vie tranquille après avoir perdu la trace du paternel l’ayant mené ici. Entouré de ses potes, Riley, Steph, Ryan et de sa petite amie Charlotte, Gabe « le petit gars sympa du coin » a donc troqué son passé de délinquant juvénile pour un job de barman sous les ailes de Jed, le patron du bar qui fait vite figure de père adoptif. Mais voilà, après des retrouvailles touchantes et après avoir fait connaissance avec tout ce petit monde, un accident plutôt louche provoque le décès de Gabe (c’est dans le trailer, pas de spoil ici, ça va aussi)… Et c’est à nous de démêler le fond de l’affaire, car il semble bien que Typhon Mining, une grosse entreprise chargée de l’exploitation des mines, soit derrière tout ça. Fuck you capitalism.


Quelque part entre drame familial et thriller, LiS 3 ne pousse en réalité jamais bien loin ses velléités narratives et dramatiques, bien que le début du jeu (avec la perte de Gabe donc) soit un événement absolument tragique. C’est qu’en réalité, il n’est pas question ici de parler de destruction ronflante d’une ville balnéaire à grand coup de tornade (le pitch du 1) ou de road trip infernal aux milles idées qui s’éparpillent et papillonnent pour ne mener nulle part (le pitch du 2… qui m’est passé largement au-dessus vous l’aurez compris). Non. LiS 3 est un jeu qui se place à hauteur de ses personnages, en recentrant les intrigues et les axes narratifs autour de l’évolution de leurs relations, avec en toile de fond la mort de Gabe et l’enquête menée pour faire plonger Typhon Mining (BOUHOUUUU). Et c’est d’autant plus vrai que ce troisième opus est le premier de la série à faire en sorte que le pouvoir allie narration et gameplay. En effet, là où Max de LiS 1 pouvait remonter dans le temps (en soi pourquoi pas, mais ça tournait vite au gimmick et ça entraînait, comme souvent avec les mécaniques temporelles, des incohérences malvenues), où Daniel de LiS 2 était doué de télépathie (je me questionne toujours quant à l’intérêt de ce pouvoir, à part à provoquer le classique : « Un grand pouvoir implique de grande responsabilité »… OK oncle Ben), nous avons affaire ici à un pouvoir nettement plus humain : l’empathie. Mais pas celle de monsieur et madame tout le monde, non, car Alex est en vérité empathe. Elle est submergée des émotions des autres dès lors qu’elles sont éprouvées avec une forte intensité, ce qui lui permet de les ressentir profondément (et même de les voir sous forme d’aura colorée), au point de pénétrer les pensées d’autrui.

Aura bénéfique

Au cours de cinq chapitres, nous allons ainsi évoluer et devenir l’éponge de cette petite bourgade, essayant tant bien que mal de régler les problèmes des un.e.s et des autres en apaisant colère, tristesse, peur et autres vives réactions aux événements tragiques qui secouent la ville. Bien que dirigiste et linéaire, toute la beauté du titre se situe dans ces interactions qui nous permettent tout à la fois de comprendre les atermoiements d’Alex tout en questionnant nos manières d’interagir. Plus que jamais, parce que l’héroïne est douée d’un pouvoir intrusif, c’est à nous de gérer avec quel degré nous allons en effet dévier les personnages de leurs pensées propres jusqu’à dérégler le cours naturel des choses. En somme, manipuler ou non par les émotions, alors même que c’est le drame éminemment personnel de quelqu’un qui, passant son temps à canaliser les émotions des autres, en oublie elle-même ce qu’elle ressent. Et le jeu de questionner le choix en lui-même, sa portée à court et long terme non pas dans l’optique de tracer son propre chemin au sein d’un récit déjà mis à plat de toute façon, avec cette décorrélation froide et égoïste de l’entité joueuse mise au centre du tout, mais bien dans celui de rendre organique le monde sur lequel nous influons. Un ping-pong constant qui situe le filet de l’attention au centre des personnages, lesquels se nourrissent les uns des autres au fil de l’aventure.


Alors oui, les personnages sons attachants mais peu profonds, oui Alex est une héroïne un peu effacée, oui le pic dramatique se réalise dès le début du jeu. Mais tant mieux, car LiS 3 est une œuvre humaine qui, en recentrant ses velléités narratives via une mécanique de jeu efficace et cohérente, avec des saynètes tendres et triviales, nous aident à mieux cerner l’enjeu de nos manières d’interagir : s’intégrer dans le jeu social et mettre un temps de côté notre propension à ne penser qu’à notre gueule.

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