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THE HOLIDAY (critique)

Dernière mise à jour : 1 janv. 2022

Quinze ans après sa sortie, The Holiday est devenue l’une des comédies romantiques les plus appréciées par les aficionados du genre. Pauline Lecocq revient sur ce film merveilleux pour Pettri à cette occasion.

Après des difficultés sentimentales, deux femmes (l’une anglaise, l’autre américaine), échangent leurs maisons le temps des fêtes de fin d’année. Avec ce pitch gentiment intriguant, on pourrait penser que le film va jouer la carte du décalage entre la culture américaine (et plus précisément californienne) et la culture britannique. C’est d’abord ce qu’il fait par le biais des deux personnages féminins (et notamment Cameron Diaz marchant en talons aiguilles dans la neige du Surrey), mais c’est évacué finalement assez vite pour parler d’autre chose. Alors, qu’a-t-elle de plus, cette énième rom-com ? Pour nous, deux aspects font qu’elle se démarque.


Le premier est son aspect méta. En effet, il y a constamment un lien avec le 7e art via les métiers qu’exercent plusieurs personnes. Le personnage qu’interprète Cameron Diaz est par exemple une créatrice de bandes-annonces (ce qui amène des séquences très drôles pour le spectateur), Jack Black est un compositeur de musique (ce qui vaut deux belles séquences, dont une inoubliable dans un magasin de DVD à propos des musiques de films marquantes), Shannyn Sossamon est actrice et Eli Wallach est un scénariste retraité. L’hommage au cinéma hollywoodien des années 30-40, et plus particulièrement au cinéaste de la comédie sophistiquée Ernst Lubitsch est d’ailleurs prépondérant. Le personnage incarné par Eli Wallach décrit ainsi la rencontre entre Gary Cooper et Claudette Colbert dans La Huitième femme de Barbe Bleue (1938) comme modèle de rencontre amoureuse entre deux personnes, et parle de l’âge d’or d’Hollywood avec beaucoup d’émotion. Par ailleurs, The Holiday se concentre sur la réhabilitation de ce personnage à travers un hommage que lui fait le milieu du cinéma. On peut penser que c’est également ce que tente de faire le film : rendre hommage à la comédie de l’âge d’or hollywoodien (avec les moyens et les codes du 21e siècle).

D’autre part, The Holiday parle des relations hommes-femmes, mais de façon un peu différente. Par exemple, il inverse parfois les rôles femmes-hommes : Cameron Diaz est en effet incapable de pleurer alors que Jude Law (son love interest) a la larme facile, sans que ce soit tourné en ridicule. De plus, l’actrice américaine danse non pas sur du Mariah Carey ou du Britney Spears (comme on pourrait s’y attendre dans ce genre de films) mais s’éclate sur le tube rock « Mr. Brightside » de The Killers. Enfin, la description de la relation toxique entre Iris (Kate Winslet) et Jasper (le toujours parfait Rufus Sewell) mérite le détour, et nous semble moins clichée que ce à quoi nous pouvions nous attendre. Kate Winslet joue ainsi le personnage le plus attachant et auquel le spectateur peut le plus s’identifier, tellement cette relation paraît loin d’Hollywood et de ce que la comédie romantique ultra codée a l’habitude de décrire. De même que la relation entre Jack Black et la trop rare Shannyn Sossamon. On est bien plus proche des relations ordinaires que du conte de fées d’ordinaire dépeint dans le genre de la rom-com. Le spectateur en a d’ailleurs pour son argent : deux histoires, l’une de conte de fées et l’autre, plus intéressante à nos yeux, d’ouverture aux autres et d’affirmation de soi.

Peut-être que la personne derrière ce film y est pour quelque chose. En effet, on apprécie la scénariste-réalisatrice Nancy Meyers qui nous a offert quelques bien belles comédies : A nous quatre, Ce que veulent les femmes, Tout peut arriver. Ici, sa mise en scène sans esbroufe (mais avec quelques fantaisies dans le montage) met en avant son scénario bien affuté et le jeu de ses acteurs. Cameron Diaz surjoue la Californienne bosseuse et extravertie avec un plaisir communicatif, et Jude Law est tout bonnement irrésistible en Anglais mystérieux. Quel bonheur aussi de voir Jack Black dans un rôle plus sensible (bien qu’on l’adore dans son jeu excessif et expressif par exemple dans Rock Academy, High Fidelity ou Jumanji nouvelle version) ! On a également plaisir à retrouver Rufus Sewell (le méchant dans Chevalier, excellent film méconnu) dans un rôle de séducteur ambigu. Quant à Eli Wallach (le fameux Tuco dans Le Bon, la Brute et le Truand !), il est tout simplement merveilleux de modestie et de délicatesse joyeuse et vole presque toutes les scènes dans lesquelles il apparaît. Mais en face de lui, il y a une actrice de taille qui lui rend la balle, ce qui donne peut-être les plus beaux moments du film : l’incroyable Kate Winslet. On apprécie particulièrement son jeu tout en nuances et en retenue d’une femme en souffrance, qui se sacrifie puis qui finit par s’affirmer. Pour l’anecdote, elle joue un personnage qui s’appelle Iris pour la deuxième fois de sa carrière (la première était dans le long-métrage éponyme de 2001 réalisé par Richard Eyre à propos de l’autrice Iris Murdoch) ! Et n’oublions pas de mentionner la jolie musique pétillante composée par Hans Zimmer qui vous reste longtemps en tête après la fin du long-métrage.

The Holiday est donc un film éminemment charmant, très drôle et émouvant, certes sucré mais sans overdose. Comme dirait Iris (Kate Winslet), « I like corny. I’m looking for corny in my life » (« J’aime la niaiserie. Je recherche la ringardise dans ma vie ») (voir l'extrait ci-dessous). Ces deux phrases pourraient résumer le film qui est une invitation à laisser entrer un peu de fantaisie vieux jeu et mièvre dans nos vies, surtout en période de Noël. De plus, le long-métrage n’a pas la prétention d’atteindre les hautes cimes des chefs d’œuvre de la comédie sophistiquée des années 30-40, mais nous offre un pur plaisir de cinéma, ce qui est déjà beaucoup. Dans le genre très codé de la comédie romantique, le 7e art a rarement fait mieux, surtout en en profitant pour rendre hommage à l’âge d’or hollywoodien et à la musique de film, tout en mélangeant conte de fées et vie ordinaire. On vous recommande donc fortement ce petit bijou, parfait pour Noël et les fêtes (seul.e, en couple, en famille, entre ami.e.s…), et qu’on ne se lasse pas de voir et revoir !

Extrait "I love corny. I need corny in my life" :


Plus un tweet (thread plutôt) qui résume bien pourquoi le film est chouette :


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