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PETTRIVIEW #15

Pour ce nouveau PETTRIVIEW, Jofrey La Rosa vous propose de (re)découvrir quatre œuvres culturelles qui l'ont marqué récemment : deux spectacles, une série et un album musical !


Dans notre monde qui tend de plus en plus vers le télétravail, où vie professionnelle et vie personnelle se confondent souvent, Severance prend le parti conceptuel jusqu'au-boutiste de séparer le plus possible ces deux facettes de la vie de ses protagonistes. Menée par Adam Scott (Party Down, Step Brothers), Britt Lower (Man Seeking Woman, Future Man), Zach Cherry (Crashing, You), John Turturro (O’Brother, The Big Lebowski) et Patricia Arquette (True Romance, Medium), la série est dirigée par un Ben Stiller en grande forme, qui semble avoir pris un virage dramatique totalement sérieux depuis La Vie Rêvée de Walter Mitty (ainsi que la série méconnue Escape at Dannemora). Severance arrive à passionner de bout en bout, jouant habilement de son esthétique léchée et glaciale pour créer de réels cliffhangers efficaces, dans une bulle d’intelligence pure, tantôt étonnant, tantôt ludique, dans une intrigue rondement menée, dont il me tarde de découvrir la suite en saison 2.


Super chroniqueur depuis l’époque du Petit Journal, depuis comédien, Panayotis Pascot joue depuis quelques mois son premier one-man show nommé Presque, en tournée un peu partout en France. Mis en scène par Fary, il enchaîne près d’1h30 d’un spectacle extrêmement drôle d’une part, mais aussi étonnamment introspectif et émouvant. Le jeune homme nous raconte une histoire, la sienne, simple, personnelle et universelle, entre ses relations avec la gente féminine, sa famille, sa passion de la scène, pour un spectacle assez génial, parfaitement écrit, interprété avec finesse et une drôlerie toujours touchante et sincère. Parce qu’au-delà des punchs constantes, on retiendra de belles trouvailles telles que : “Mets des slips sur tes phrases, on voit les couilles de tes émotions”. Une belle réussite que ce one-man étonnant, parmi les meilleurs de mémoire récente. À ne manquer sous aucun prétexte.


Jerrod Carmichael est un comédien américain que nous ne connaissons pas tellement en France. Pourtant, il est éminemment drôle d’une part, intéressant d’autre part. Au-delà de sa sitcom The Carmichael Show, vous avez pu l’apercevoir dans la comédie Neighbors en 2014 (et sa suite deux ans plus tard) ou dans le dernier Transformers en date. Proche du rappeur Tyler The Creator, il apparaît aussi comme le narrateur de son album IGOR (2019), et travaille actuellement le script de l’adaptation du comics crossover Django/Zorro avec Quentin Tarantino. Mais c’est surtout dans le stand-up qu’il excelle. Ces deux premiers "specials" Love at the Store en 2014 puis 8 en 2017 ont créé l'intérêt, mais ses deux documentaires ultra personnels Home Videos et Sermon on the Mount en 2019 ont fini de convaincre par la sincérité frontale de la sensibilité de cet artiste complet, entre sa condition de noir-américain, sa carrière et son humour, qui osait avouer à sa famille conservatrices ses relations sexuelles avec à la fois des femmes et des hommes. Mais dans son dernier spectacle special pour HBO, il fait enfin le dernier pas en (s’)avouant son homosexualité, dans l'intimité d’un petit club de jazz new-yorkais, une chemise en soie rouge sur les épaules. Assis durant la totalité de ce stand-up, Jerrod joue avec les spectateurs, qui lui parlent parfois dans une conversation à cœur ouvert. Et ce sans jamais oublier d’être drôle au-delà de l’évidente émotion qui traverse cette recherche d’identité, qu’il fait passer en avouant son vrai prénom, celui qui donne son nom à ce nouveau show réalisé par Bo Burnham (Inside, Eighth Grade) définitivement très spécial : Rothaniel.


Musique : Vald - V

Dans le paysage du rap français, le nouvel album de Vald faisait figure d'incontournable. De là à combler les attentes folles des fans ? Parce qu'après la tournée avortée pour son précédent projet Ce Monde est cruel, Vald avait essuyé quelques semi-échecs commerciaux (qui n'en étaient pas vraiment) : Horizon Vertical (son album commun avec Heuss L'Enfoiré), les deux tapes de son nouveau label indé Echelon et surtout le clip de son single raté Footballer. Mais tout cela n’a pas ébranlé l’entreprise V.A.L.D puisqu’avec V, son quatrième album studio mais dixième projet, l’artiste originaire d’Aulnay-sous-Bois débite un rap précis, efficace et direct, sans réel single certes, mais avec un réel amour du hip-hop - ce qui se fait de plus en plus rare dans le rap fr actuel. Seuls trois feats sur l’album, cependant tous parfaits : 24 mesures d’un Orelsan très en forme sur Péon, un refrain entêtant du Sauce God Hamza sur Maudit et un titre pop inattendu avec l’éternel comparse Suikon Blaz AD, avec une Happy End pour conclure la galette simple. Parce qu’en plus de ce disque standard, la team de Vald a eu la bonne idée de distiller deux titres bonus sur quatre éditions supplémentaires, soit huit sons en plus au total, en plus d’avoir une intro différente entre l’édition physique et le streaming (Sushi/Pandémie). Résultat : disque de platine en 23 jours. Et parmi ces titres bonus, moins écoutés, des petites perles, comme dans l’album entier. Et surtout partout, des punchs fermes et une écriture ciselée, des flows de l’espace, pour un disque peut-être en deçà des précédents, mais néanmoins toujours impactant - tout simplement parce qu’on a affaire à un des plus grands rappeurs (et artistes) français actuels.

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