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Pauline Lecocq

ORGUEIL & PRÉJUGÉS A 15 ANS (LETTRE PERSONNELLE)

Orgueil & Préjugés (2005) :


Lettre subjective et nostalgique

ou

réminiscence d’un éveil cinématographique (et) austenien

ou encore

itinéraire imparfait d’une janéite au XXIe siècle



Le film Orgueil & Préjugés (Pride & Prejudice) réalisé par Joe Wright est sorti en France il y a 15 ans aujourd’hui. Je l’ai découvert en salles il y a 15 ans également, le jour de sa sortie. Puis je l’ai revu au cinéma lors d’une projection pour célébrer son 10e anniversaire. C’est un long-métrage qui m’accompagne depuis maintenant la moitié de ma vie. Alors je vais revenir un peu sur mon histoire d’amour avec ce film.


Dans le film The Jane Austen Book Club (2007), Bernadette (Kathy Baker) dit cette réplique qui est depuis devenue l’une de mes préférées : « Let us never underestimate the power of a well-written letter. » (« Ne sous-estimons jamais le pouvoir d’une lettre bien écrite »). Elle explique aussi que les lettres chez Jane Austen sont capitales, alors quoi de mieux qu’une lettre dédiée à ce film qui a marqué l’itinéraire de son autrice.



First Impressions / Première Impression


Il est une vérité universellement reconnue que le premier visionnage d’un film scelle la relation que l’on va avoir avec lui. Vous l’aimez alors vous le revoyez, vous ne l’aimez pas donc vous le laissez de côté. Je caricature mais c’est à peu près ça. Et mon premier visionnage fut presque un acte manqué.


D’abord, il y a cette journée cinéma à Evreux (impossible de me rappeler si c’est celle sur Kubrick, Lubitsch ou autre), quand j’étais au lycée, je ne sais plus très bien si l’on est en décembre ou en janvier. En tout cas, on est à un café entre deux projections et sur un écran de télévision dans un coin passe la bande-annonce de ce film en costumes qui se déroule dans la nature et dont les images et la musique ne cessent de me ravir. Sortie le 18 janvier montre le dernier carton. Je me dis que j’aimerais bien le voir.


Le mercredi 18 janvier, c’est aussi la sortie du long-métrage Le Secret de Brokeback Mountain en France, et ce film est ma priorité. Avec mes amies de l’internat, nous avons hâte de le voir et nous descendons à pied (ou en bus peut-être) avec impatience au Ciné-Zénith (aujourd’hui un Pathé). Et puis, arrivées devant le cinéma et les affiches des sorties, nous déchantons : Brokeback Mountain n’est pas programmé cette semaine, mais sortira en décalé le mercredi suivant. Qu’est-ce qu’on fait ? Que va-t-on voir à la place ? Un ticket pour l’espace, Pompoko, Bandidas, Chaos ? On tombe d’accord pour ce film romantique dans la campagne anglaise qui me faisait les yeux doux depuis quelques temps. Il est en version originale sous-titrée en plus, chose pas si commune dans notre cinéma. On prend nos billets, on s’assoit. Et là, l’expérience est magique.


Je suis éblouie et j’aime tout : la mise en scène avec ses longs plans en mouvement, les excellents dialogues et l’écriture, l’humour ironique, les costumes, les décors, la musique, l’interprétation des comédiens… Certaines scènes me transportent : la danse dans une pièce vide, la dispute sous la pluie, la balançoire et le passage du temps, et surtout l’avancée de Mr. Darcy au petit matin demeure l’un des moments les plus romantiques que j’ai jamais vu. Il n’y a pas de baiser, et c’est peut-être encore plus beau (mini spoiler pour celles et ceux ne l’ayant pas encore vu). Enfin, il y en a un dans la version américaine mais passons. En vérité, comme son premier plan sur le soleil qui se lève le suggère, c’est l’histoire d’un éveil, et précisément celle d’un éveil amoureux, éveil qui se transmet à son spectateur.


En effet, quand le générique de fin défile, je sais que je viens de tomber amoureuse.


Retour à la réalité. Mes amies ont plutôt aimé le film, je crois. Pourtant, en sortant de la salle, F* me dit « moi je préfère la version Coup de foudre à Bollywood, c’est moins gnangnan » (ou quelque chose de ce style) en faisant référence à la marche de Darcy notamment. Je hoche la tête car je n’ose pas la contredire, et débattre au fond de quelque chose que je n’ai même pas encore pu intellectualiser. Mais en réalité, je me sens transfigurée par la beauté, la grâce et l’histoire de ce film. Et si je dois le chérir dans mon coin et bien qu’il en soit ainsi. Coup de foudre à Bollywood (2004), je l’avais vu quand on était encore abonné à Canal+ avec ma famille et que mon père avait bien voulu me l’enregistrer sur VHS. Impossible de me rappeler si c’était avant ou après ce 18 janvier 2006. Je me souviens juste que j’avais bien aimé, mais sans plus (il n’y avait pas de bisou non plus dans celui-là d’ailleurs). Et je ne savais pas à l’époque que c’était une transposition moderne du roman de Jane Austen. Le titre original est beaucoup plus parlant d’ailleurs, voyez plutôt : Bride & Prejudice.


Quand on aime quelque chose, on a envie de le partager et de le montrer à la terre entière.


Quelques mois plus tard, je reçois le DVD en cadeau, lorsque les DVD paraissaient six mois après la sortie française en salles des films. Je le vois avec ma famille, en VO sous-titrée (on commençait alors à voir les films dans leur version originale), qui apprécie le film, puis avec mes grands-parents lors d’un séjour chez nous (en VF cette fois, ce qui m’agace un peu, la langue et l’accent anglais étant un délice).

En prépa, je l’ai montré à mes amies, qui l’avaient vraiment aimé. Avec C*, une autre amie janéite (comprenez : fan de Jane Austen), on avait même fait imprimer un t-shirt avec une citation de Darcy et une autre d’Austen. J’avais même poussé mes copains cinéphiles J* et K* à une projection, qu’ils avaient finalement accepté, me faisant une fleur. K*, étonné et admiratif, s’était même exclamé : « il dure depuis combien de temps le plan, là ? ». A la fin, il me semble que l’avis général était que « c’était moins pire qu’[ils] imaginaient ». Encore un bon point pour le partage. Et qui a dit que c’était un film seulement réservé aux filles ? A part avoir bombardé mes proches avec ce film, il me semble qu’il a aussi eu un autre impact.



Sensibility & Sense / Sentiments & Raison…nement


Car oui, Orgueil & Préjugés est sans doute le film qui m’a le plus influencé ces quinze dernières années.

En le voyant j’ai découvert Jane Austen, c’est-à-dire que je ne connaissais pas cette autrice et j’ai eu envie de lire ses romans. J’ai découvert Keira Knightley, que je connaissais avec Pirates des Caraïbes bien sûr et Joue-la comme Beckham, et qui ne m’inspirait pas grand-chose, mais je l’ai DÉCOUVERTE dans ce film. Elle y est incroyable. Son interprétation lui vaudra d’ailleurs sa première nomination aux Oscars, et c’est mérité.

J’ai découvert le merveilleux Matthew Macfadyen et sa voix incomparable que j’ai suivi ensuite dans la série MI5 (Spooks en anglais) puis au cinéma et à la télévision. Dernièrement il est dans Succession (HBO) d’ailleurs pour les intéressé.es.

Alors stagiaire, j’ai hurlé lors d’une réunion dans une grande institution audiovisuelle quand son nom a été prononcé et qu’il a été dit qu’il accompagnerait sa femme présentant une œuvre. Pas mon moment de fangirl le plus glorieux, mais bon. Et puis il n’est pas venu finalement (la déception)…

J’ai découvert aussi de nombreux.ses acteur.ices dont j’ai suivi avec bonheur les carrières par la suite. Les vrai.e.s savent notamment que la merveilleuse Rosamund Pike était déjà une star dans ce film (on oublie Meurs un autre jour (2002) ? La réponse est dans la question) avant d’exploser dans Gone Girl presque 10 ans plus tard. Et que c’était le tout premier film de Carey Mulligan (Kitty) avec la carrière que vous savez. Simon Woods (l’adorable Mr. Bingley) sera ensuite au casting de l’excellente série Rome en jouant Octave. Tom Hollander est également fantastique en Mr. Collins, beaucoup moins libidineux que dans les autres versions. En outre, j’avais à peine reconnu Judi Dench à l’époque, que je ne connaissais que pour son rôle de M dans James Bond (ère Pierce Brosnan à ce moment-là).

Enfin, j’ai découvert Joe Wright, le réalisateur, dont j’ai ensuite adoré le deuxième film, Reviens-moi (Atonement). En suivant un cursus d’études cinématographiques à l’université, c’est donc naturellement que j’ai fait mon mémoire de Master 2 sur son œuvre. Mon premier mémoire était également lié à ce film puisqu’il était sur les adaptations de Raison & Sentiments au cinéma et à la télévision, autre roman de Jane Austen. En vérité, j’aurais clairement pu écrire une thèse sur les soupirs qui ponctuent les scènes dans Orgueil & Préjugés.

Je reconnais aujourd’hui, sans doute en partie grâce à ce film, être obsédée par l’idée de mouvement au cinéma, de plans qui bougent et virevoltent, de plans-séquences à la maestria qui vous scient. J’y étais déjà sensible avant, notamment avec Elephant de Gus Van Sant et Magnolia de Paul Thomas Anderson, mais là c’est l’idée de romanesque directement incorporé à la mise en scène qui me fascine. Et Joe Wright est très doué pour les créer. Cependant, sa marque de fabrique, ce sont ses travellings latéraux (surtout sur la droite, parfois sur la gauche), plans rarement utilisés chez d’autres.



Le film m’accompagne aussi dans mes cours à l’université. Je me rappelle par exemple que dans un cours sur David Lean avec Pr B., je n’avais osé écrire à la fin de ma copie lors d’un devoir sur table que Joe Wright reprenait le raccord à l’allumette célèbre de Lawrence d’Arabie (le personnage éponyme souffle sur une allumette et on passe dans le désert), chose que mon professeur avait ensuite expliqué lors d’un cours (avec Elizabeth soufflant sur une plume et raccordant sur une flamme dans un autre lieu). Je m’en étais voulue, bien entendu. Par la suite, j’ai même suivi un cours dédié aux adaptations et à Jane Austen, dans lequel j’ai rencontré des futur.es ami.es, notamment A*. Puis un autre cours sur l’adaptation avec Pr H. que j’ai suivi avec une autre grande amie, A*.


En septembre 2015, soit quelques jours seulement avant de partir vivre en Angleterre, madmoiZelle organise une séance CinémadZ pour célébrer les 10 ans de la sortie dans les salles anglaises du film (2005, donc). Par hasard, j’y retrouve des copines de prépa que je n’avais pas vu depuis longtemps, C* et C*, dont l’une m’explique qu’elle préfère quand même la série de 1995.


Quelques mois plus tard, je commence une série de vidéos sur les adaptations du roman Orgueil & Préjugés au cinéma et à la télévision, je ne sors que la première, le travail sur le montage étant conséquent. Aujourd’hui j’ai envie de m’y remettre sérieusement, en retravaillant le format. Je m’amuse aussi depuis longtemps à repérer les mentions de Jane Austen ou du film de 2005 au cinéma et à la télévision, et il s’avère qu’il y en a de plus en plus !

En Angleterre, je me suis également rendue dans la maison de la romancière à Chawton, transformée en musée, et nous sommes allées au festival annuel Jane Austen à Bath avec C*. Et j’y étais quand les billets de £10 ont été lancé à l’effigie de la romancière (avec une petite polémique sur la citation à utiliser).


Plus récemment, le film vers lequel j’avais envie de me tourner pour passer le cap fatidique des 30 ans était celui-ci. Bon finalement j’ai suivi les élections américaines, mais passons.


De plus, je collectionne les livres écrits par et sur la romancière et ses adaptations. Et puis, à chaque fois que je vais dans une librairie, je fais un tour à l’étagère de lady Jane pour voir ce qu’il y a de disponible. C’est mon petit rituel. Et je vois ses livres prendre de plus en plus de place au fur et à mesure des années et ça me met en joie.



“I do not have the talent of conversing easily with people I have never met before.” / « Je n’ai aucun talent pour converser facilement avec des personnes que je n’ai jamais vues avant. »


Plus le temps passe, plus je me retrouve en ses deux personnages principaux, comme un ying et un yang, deux contraires qui s’attirent, deux entités contraires qui se complètent. D’un côté, Elizabeth m’a donné envie de tenir tête et de garder mon côté têtu, d’affirmer mes opinions, de rester proche de ma famille et de prendre soin d’elle, d’être libre. Notamment sa liberté d’échapper aux carcans de la société qui voudrait qu’elle se marie point barre, ou de nos jours qu’elle se case. J’admire toujours sa vivacité d’esprit, son intelligence et sa répartie que je n’ai pas. D’un autre côté, je me retrouve en Darcy avec sa loyauté et sa générosité. De plus, mon anxiété sociale et mes bizarreries, mon côté introverti, stressé, « awkward » je le retrouve chez Darcy, dans l’interprétation qu’en fait Macfadyen, avec cette phrase qui prend tout son sens, encore plus aujourd’hui, et qui résume le personnage à elle seule : “I don’t have the talent to converse easily with people I’ve never met before” (« Je n’ai aucun talent pour converser facilement avec des personnes que je n’ai jamais vues avant »).


Parfois j’ai autant de talent pour discuter avec de nouvelles personnes que Bridget Jones à porter des culottes de grand-mère. Ça peut paraître du name-dropping mais Le Journal de Bridget Jones est en réalité l’adaptation du roman d’Helen Fielding qui est lui-même une adaptation moderne d’Orgueil & Préjugés. Que j’avais vu à sa sortie, à l’instar de beaucoup de gens (et ça va faire bientôt 20 ans qu’il m’accompagne celui-là, mais peut-être que ça vaudra une autre lettre, tout comme 4 mariages et un enterrement). Comme quoi, Jane Austen est partout. Bref, pour revenir aux choix de Macfadyen, A* m’avait recommandé un super Tumblr qui donne accès aux pensées de Darcy (version 2005 donc), et propose un nouvel éclairage sur son comportement et ses agissements, donnant ainsi il me semble une fenêtre sur le travail de comédien de Matthew Macfadyen et des pensées qui habitaient son personnage lorsqu’il le jouait. C’est très drôle mais c’est aussi hyper intéressant pour comprendre un peu mieux la vision de 2005 du personnage : https://garrulus.tumblr.com/post/58500980990/fitzwilliam-darcys-inner-thoughts-1


Dans ce sens, sa version s’axe donc beaucoup moins sur le côté romantique torturé et désagréable du Darcy que Colin Firth joue dans la série BBC de 1995. Série que j’ai vu trois fois, dont une fois avec ma mère et une autre fois avec C*, et pour laquelle je n’éprouve pas le même attachement que pour le film. Certes, j’apprécie le grand soin apporté aux décors, aux costumes, et je trouve les acteurs en général plutôt bons (Colin Firth bien sûr), mais je trouve qu’elle a vieilli. Et puis la mise en scène statique ne m’emporte pas. Je crois que pour les mouvements du cœur, il me faut des mouvements de caméra. Et certes, la série est extrêmement fidèle au roman, voire même trop, et c’est là où on me perd bizarrement, parce que je la trouve trop longue. Pour moi, tant qu’on respecte l’essence, le message d’un roman que l’on adapte, avec les éléments clés de l’intrigue, tout me va. Je pense au Bossu de Notre Dame de Disney en côté positif par exemple. C’est mon point de vue bien sûr, et je sais à quel point la série est aimée par les janéites.


Alors oui, le film est une adaptation condensée du roman (avec des personnages qui disparaissent notamment) et il est clairement plus romantique que le livre d’Austen et la série de 1995 (voir cette scène de grosse dispute sous la pluie) mais peut-être est-ce plus adapté à notre point de vue de spectateur.ices contemporain.es ? Je n’ai pas retrouvé cet éblouissement devant la série et je garde donc un attachement profond pour le film qui m’a fait découvrir cette histoire et ce Jane Austen (Cinematic) Universe. D’ailleurs, il y a des films que j’ai revus en réalisant que Jane Austen faisait partie de l’intrigue : Vous avez un mess@ge (1998) avec Meg Ryan et Tom Hanks, Entre deux rives (2006) avec Sandra Bullock et Keanu Reeves dans lequel le livre Persuasion de la romancière tient une place importante, et d’autres…



”Only the deepest love will persuade me into matrimony, which is why I will end up an old maid.” / « Seul un amour profond me persuadera de me marier, c’est pour cette raison que je finirai vieille fille. »


Des films d’amour. Car après tout, cette histoire parle bien d’amour. D’ailleurs, il y a deux phrases souvent citées par les janéites. La première est : “I blame Mr. Darcy for my high expectations of men.” (« j’en veux à Mr. Darcy pour mes attentes élevées/grandes espérances à l’égard des hommes »). Alors oui, c’est vrai que Jane Austen a mis la barre haut avec ses personnages et nous a offert des idéaux masculins difficiles à retrouver aujourd’hui. Mais j’ose à croire qu’il y en a toujours dans la nature. La deuxième est : “Jane Austen gave me unrealistic expectations of love.” (« Jane Austen m’a donné des attentes irréalistes de l’amour »). Well, yes and no, and agree to disagree (alors, oui et non, et d’accord pour ne pas être d’accord). Ses « contes moraux » nous enseignent bien un ou deux trucs utiles, notamment d’évoluer au contact de l’autre, d’avoir des valeurs, d’être seul.e plutôt que mal accompagné.e il me semble. S’il y a bien un aspect romantique dans le film, avec un côté passionné de la part de Lizzie et de Fitzwilliam (le petit nom de Darcy), il ne s’agit pas tout à fait d’un amour passion (même si le film exacerbe le romantisme des sentiments avec la nature) mais d’un amour profond et respectueux qui se construit, intellectuel et émotionnel, d’égal à égal, plus qu’une attirance physique. Je crois qu’on a le droit de vouloir vivre ça. Comme Elizabeth le dit elle-même : “Only the deepest love will persuade me into matrimony, which is why I will end up an old maid.” (« Seul un amour profond me persuadera de me marier, c’est pour cette raison que je finirai vieille fille »). Et c’est bien Jane Austen qui parle ici. L’autrice finira en effet ses jours sans se marier, et mourra de maladie à 42 ans seulement, laissant 6 romans, quelques nouvelles, et des œuvres inachevées derrière elle. Et tout un patrimoine. C’est en effet elle qui invente la technique d’écriture qu’on appelle le style indirect libre, c’est elle qui donne accès aux pensées de ses personnages sans utiliser la première personne. C’est elle qui décrit la société de son temps avec une ironie mordante et qui parle d’amour avec finesse. Et l’on n’a pas fini d’en entendre parler et de voir ses œuvres adaptées, sous quelque forme que ce soit. Orgueil & Préjugés est aussi une histoire sur les secondes chances, thème récurrent chez Austen et qui culmine dans sa dernière œuvre achevée (et mon roman préféré en passant) : Persuasion. On me demande parfois pourquoi j’aime autant Austen, et je crois que la réponse se trouve dans l’hilarante mini-série Lost in Austen (Orgueil et Quiproquos en français).



“I cannot fix on the hour, or the spot, or the look or the words, which laid the foundation. It is too long ago. I was in the middle before I knew that I had begun.” / « En vérité, je ne saurais désigner le jour, le lieu, le moment qui virent naître ce sentiment en moi ; il était déjà bien puissant que je croyais l’ignorer encore. »


Pour revenir à l’adaptation de 2005, Orgueil & Préjugés, dont c’est l’anniversaire de la sortie française, est le film que j’ai le plus regardé de ma vie (j’ai perdu le compte mais c’est entre 15 et 20). En effet, je le revois une fois par an minimum et je découvre quelque chose de nouveau à chaque fois. Ce moment d’évasion dans la campagne anglaise a sans doute plus de passion que dans le livre, peut-être pour s’adapter à un public moderne. J’y reviens régulièrement, parfois quand j’ai un coup au moral, et même si je le connais par cœur, j’apprécie de revoir cette histoire en en connaissant les contours, ou presque, en tout cas en remarquant toujours un nouveau détail à chaque fois qui m’avait échappé aux précédents visionnages. J’aime m’y perdre, encore et encore. Comme pour retrouver le havre de paix et de bonheur qu’il m’a procuré la première fois, et qu’il continue de me procurer. A l’instar d’Ennis et de Jack, c’est un peu mon Brokeback Mountain en somme, partagé avec certain.e.s. Combien de fois j’ai envie de citer Mr. Bennet et son “Good heavens… People ! ” (« Ciel… Des gens ! ») quand j’entre dans un endroit ou une pièce bondé.e, combien de fois j’ai envie de dire “I’m very fond of walking” (« j’aime vraiment marcher ») ou “Yes ! A thousand times yes ! ” (« oui ! Mille fois oui ! ») (petit florilège de citations que vous pouvez reprendre à l’envie pour briller en société lorsque le temps reviendra).


Il est le point déclencheur de ma passion pour Jane Austen et les adaptations audiovisuelles et plus de ses œuvres. J’ai par exemple eu la chance de voir Pride & Prejudice au théâtre, et j’étais plus qu’enthousiaste à l’idée de voir The Watsons sur scène avant vous-savez-quoi. En réalité, je ne sais pas si je me lasserais un jour de ce film. Les quinze prochaines années nous le diront. En tout cas, ce film de 2005 m’a assurément aidé à me construire et a défini une partie de ce que je suis aujourd’hui, que ce soit dans mon parcours, mes goûts ou ma personnalité. C’est aussi ça le pouvoir du cinéma et de la littérature, et de la culture en général : trouver des résonances et inspirer des destinées individuelles ou collectives.


Alors, voici mon itinéraire d’une janéite du XXIe siècle. Comme Audrey Hepburn l’a dit « Everything I learned I learned from the movies.” (“Tout ce que j’ai appris, je l’ai appris des films. ») Je ne sais pas si ça vaut pour tout, mais voici en tout cas quelques clés que j’ai retenues d’Orgueil & Préjugés :

- lors d’un conflit, essayer d’avoir les deux points de vue pour établir un jugement

- ne pas se fier à la première impression : les gens peuvent nous surprendre, en mal comme en bien

- soutenir sa famille

- accepter la personne et sa famille

- on devient une meilleure personne lorsqu’on aime

- toujours prendre la calèche pour aller à Netherfield Park quand il pleut


Sur ce, je vous laisse, j’ai un film à voir.

Merci d’avoir lu jusque-là et prenez soin de vous.

Cette lettre-pavé est dédiée à tous.tes les janéites de la terre, et à mes ami.es, mes professeurs et ma famille (dont certain.es se reconnaîtront).


PS : cet article Buzzfeed pour les anglophones avec plein de posts humoristiques sur le film (le numéro 31 résume tout !) : https://www.buzzfeed.com/ehisosifo1/hilarious-pride-and-prejudice-jokes-tumblr



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