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MALCOLM & MARIE (critique)

Dernière mise à jour : 9 févr. 2021

Après deux épisodes spéciaux d'Euphoria, Zendaya et Sam Levinson nous offrent un film sensuel et bavard, en forme de huis-clos, avec en plus un John David Washington électrique. Malcolm & Marie est sur Netflix depuis ce 5 février.

Sam Levinson n’a pas chômé durant cette année confinée. Bien que nous ne pouvions pas voir de saison 2 à sa grandiose Euphoria avant un moment, il nous a néanmoins gratifié de deux épisodes spéciaux, tournés selon des règles sanitaires strictes. Mais avant cela, il avait testé un autre tournage en temps de pandémie, celui de Malcolm & Marie. Quand l’équipe d’Euphoria s’est retrouvé dans l’impossibilité de tourner la deuxième saison de la somptueuse série entamée en 2019, Zendaya, son actrice principale, a mis au défi Sam Levinson d’écrire un film tournable dans des conditions restreintes qu’imposent ces temps troublés par l’épidémie. Levinson s’exécute et il en résulte un huis-clos avec uniquement deux comédiens, tourné en équipe réduite et en noir-et-blanc, aussi personnel que réflexif sur l’Hollywood actuel.


John David Washington (BlackKklansman, Tenet) et Zendaya (Euphoria, Spiderman Homecoming) interprètent un jeune couple branché hollywoodien. Lui vient de projeter son premier long métrage, succès à la clé. Mais elle a quelque chose qui la chiffonne. Malcolm n’a pas remercié Marie lors de son discours. Dès lors, le couple règle ses comptes, entre bisbilles orales, câlins tactiles et réelles rancœurs. Si Levinson s’est inspiré d’un événement similaire qui s’est déroulé avec sa productrice de femme Ashley, il met en scène ses deux acteurs Noirs et leur donne de quoi échanger dessus, surtout sur la woke culture. Brillamment écrit, mais aussi sublimement mis en scène et en images, Levinson filme ses comédiens comme les stars qu’ils sont. La magnétique Zendaya mérite d’ores et déjà son Oscar (après son Emmy l’an dernier) et John David Washington livre une composition sans faille, physique et électrique. Le troisième personnage de ce huis-clos, c’est la photographie. Le splendide noir-et-blanc en 35mm de Marcell Rév percute, magnifie et met en lumière les visages et les corps de ces comédiens entre une modernité toute classique et une ultra-contemporalité qui donne au film un ton très singulier.


On pense au cinéma européen : Bergman, Godard, Pialat. Mais aussi à Cassavetes, dans la façon de vouloir capter le moment, la parole, les regards. Et oui, le noir-et-blanc aide. On pense aussi - et c’est moins étonnant - aux tirades de Levinson dans Euphoria et à sa mise en scène si personnelle, qu’on a pu voir dans sa petite bombe Assassination Nation. Cependant, Malcolm & Marie ne ressemble réellement à rien d’autre. C’est tellement brillant et intense, beau et tendu, et dépeint in fine un malaise apaisé. Le film semble être une introspection, fantasmée certes, mais honnête, furieuse et classieuse. À en juger, la musique géniale qui accompagne les formidables images : James Brown, Alabama Shakes, Duke Ellington, Outkast et Labrinth dans les esgourdes qui plus est, il y a pire compagnie. Bon, tout de même un petit hic (il en faut bien un) : découvrir ce film sur grand écran aurait été un plus. Pinaillons donc. Reste un petit goût de classique pour un possible chef d'œuvre en devenir.

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