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LE DÎNER DE CONS (critique)

À l'occasion des 25 ans de la sortie de la comédie culte Le Dîner de cons, Pauline Lecocq revient pour PETTRI sur les aventures de François Pignon, personnage créé par Francis Veber, ici incarné par un merveilleux Jacques Villeret faisant face à Thierry Lhermitte.

Synopsis : Pierre Brochant, célèbre éditeur parisien, participe toutes les semaines à un « dîner de cons ». Chacun doit amener un convive ridicule dont les hôtes se moqueront toute la soirée. Seulement, il n’a toujours trouvé personne. C’est là que François Pignon fait son entrée…


« Le temps ne fait rien à l’affaire, quand on est con, on est con » chante Brassens durant le générique. Difficile de faire une critique d’une comédie française aussi culte, au même titre que Les Visiteurs ou Intouchables. En effet, avec plus de 9,2 millions d’entrées au moment de sa sortie en 1998 (plus gros succès de l’année après Titanic) et ses 3 César (meilleur acteur pour Jacques Villeret, meilleur second rôle pour Daniel Prévost et meilleur scénario pour Francis Veber) ce classique de la comédie française fourmille de répliques et de scènes devenues cultes (« Juste Leblanc » « Marlène Sasoeur » « c’est pas la stratégie qui m’inquiète, c’est le stratège » …). Le succès fut d’ailleurs tel qu’un remake américain fut réalisé en 2010 (The Dinner, de Jay Roach avec Paul Rudd reprenant le rôle de Brochant et Steve Carrell celui de Pignon).

En utilisant le ressort classique comique de l’arroseur arrosé, Francis Veber, dont c’est à l’époque le 8e film en tant que réalisateur et scénariste, continue d’explorer son personnage fétiche de François Pignon (d’abord incarné par Jacques Brel dans L’Emmerdeur puis par Pierre Richard dans plusieurs long-métrages). Il adapte sa pièce à succès et réduit sa durée pour le cinéma (on passe de 2 heures à 1h20). Avec ces dialogues brillants et ces situations comiques infaillibles, Veber devait trouver des acteurs incroyables pour leur donner vie. Et c’est chose faite.

En effet, il faut un grand talent pour jouer les benêts et le regretté Jacques Villeret, reprenant son rôle créé sur scène, en a à revendre : sa bonhomie naturelle en fait un parfait François Pignon, avec toute sa naïveté, sa candeur, sa générosité, et finalement son humanité. Comme le dit Veber lui-même : "Villeret, poétique, donne à la connerie de Pignon une vraie profondeur." Et quel plaisir de voir le comédien prendre l’accent belge pour jouer un producteur, mise en abyme du métier d’acteur, Pignon prenant un malin plaisir à devenir autre et à s’inventer un ou plusieurs personnages ! Face à lui, son partenaire lui rend magnifiquement la balle : Thierry Lhermitte (remplaçant Claude Brasseur qui jouait le rôle sur les planches), qu’on n’a jamais vu aussi roublard, est également parfait en grand bourgeois suffisant et méprisant. Il ira peut-être encore plus loin en 2013 dans Quai d’Orsay (sans doute son meilleur rôle) où son personnage inspiré de l’homme politique Dominique de Villepin aura lui aussi la caractéristique d’être stupide. Leur duo fonctionne à merveille et ils sont entourés par une belle brochette de seconds couteaux : Francis Huster et surtout Daniel Prévost qui campe un incroyable et machiavélique Lucien Cheval (inspecteur des impôts et collègue de Pignon) en arrivant à lui donner une belle profondeur en un instant. Catherine Frot et Alexandra Vandernoot sont très bien également, chacune dans leur registre.

C’est au niveau de la mise en scène que le film déçoit peut-être car elle est peu inventive et on a parfois l’impression de voir du théâtre filmé (alternance de gros plans et de plans larges fixes, excepté ce regard caméra magique de Daniel Prévost), impression peut-être aussi dû au huis-clos, là où des années plus tard l’excellent Le Prénom (lui aussi adapté d’une pièce de théâtre succès) proposera une mise en scène discrète et pourtant plus inspirée. Mais c’est un petit bémol car impossible de bouder son plaisir avec cette comédie de mœurs hilarante (bien que le tournage fut très difficile à cause des exigences de Veber envers ses comédiens) !


Après Le Jaguar et avant Le Placard, deux autres films de sa longue liste de succès, Francis Veber met en scène une comédie de boulevard à la mécanique imparable et porté par un tandem comique au sommet : le « méchant Monsieur Brochant » et le « mignon Monsieur Pignon ». Le con n’est peut-être pas celui qu’on croit et il est difficile de s’en lasser !


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