top of page

L’ARNAQUE (critique)

Ce film culte de George Roy Hill avec Robert Redford et Paul Newman fête ses 50 ans cette année ! L’occasion pour Jofrey La Rosa de revenir sur L’Arnaque pour PETTRI.

En 1973, nous sommes dans une période prolifique du cinéma américain. Quatre ans après le succès de Easy Rider, l’industrie se pose des questions, et à la fois la contre-culture et le Nouvel Hollywood arrivent en force au sein même du système. Parmi ceux qui vont trouver un ton disruptif, qui plaira à la fois à la vieille garde, grâce à ses adaptations théâtrales et littéraires telles que L’école des jeunes mariés, Le Tumulte, Deux copines, un séducteur, Hawaï ou Millie, mais aussi aux petits jeunes plus avant-gardistes avec notamment ses chefs-d’œuvre Butch Cassidy & The Sundance Kid et Abattoir 5, il y a le cas George Roy Hill. C’est après ces deux films plus que marquants qu’il met en scène L’Arnaque, comédie dans laquelle des gangsters échafaudent un plan pour se venger d’un tricheur. Il fait appel à ses deux stars favorites, Paul Newman et Robert Redford, pour mener ce film classieux et symbole du cool. Robert Shaw vient parfaire le tableau, pour créer un classique immédiat, qui a remporté 7 Oscars l’année de sa sortie, dont les convoités Meilleur Film, Meilleur Réalisateur et Meilleur Scénario. Pas mal.


En 1936, dans l’Illinois de la Grande Dépression, Johnny Hooker (Robert Redford) est un petit arnaqueur faisant équipe avec Luther Coleman (Robert Earl Jones). Ce dernier lui apprend qu’il prend sa retraite et que Johnny devrait contacter un certain Henry Gondorff (Paul Newman) pour qu’il lui apprenne “la grosse arnaque”. Mais à cause de son addiction au jeu, Johnny provoque la mort de Luther, puisque ne pouvant pas régler une dette auprès d’un certain Lonnegan (Robert Shaw). Johnny part donc pour Chicago et rencontre le fameux Gondorff. Ensemble, ils vont monter une grosse arnaque pour venger Luther, et faire tomber Lonnegan. Un pitch simple mais efficace, dans lequel nos deux héros s’associent pour faire d’une pierre deux coups : accomplir une vengeance implacable pour leur ami, et s’enrichir au passage. Et si les décors, les costumes et la photographie sont somptueux, ce qui marque dans The Sting (L’Arnaque en VF), c’est bel et bien ses comédiens, beaux et charismatiques en diable, qui magnétisent la caméra, qui quant à elle n’est jamais avare de jolis moments de mise en scène, par des cadrages et mouvements d’appareil à la fois typiques de l’époque, et brillants sur le point technique. La classe décontractée qui émane de chaque seconde du long-métrage peut rappeler ce qu’a pu proposer plus tard un Steven Soderbergh sur la trilogie des Ocean’s, en plus d’avoir pleinement inspiré un cinéaste comme Martin Scorsese.

Mais c’est dans sa signature musicale que L’Arnaque marque définitivement les esprits. En 1973, c’est le moment pour réhabiliter un génie oublié de la musique américaine : Scott Joplin. Le Roi du Ragtime, forme primitive du jazz, musique dansante et populaire, a signé quelques-uns des morceaux les plus reconnaissables du genre, qu’on retrouve dans L’Arnaque. The Entertainer et Solace font éminemment partie du paysage musical du film, et l'imprègnent de leur énergie et de leur empreinte bondissantes, marquées par la culture afro-américaine, symbolisée ici par Luther, mentor qu’on venge, et par le travail de reconnaissance que les États-Unis font sur leur propre Histoire. L’Arnaque n’est donc pas seulement une comédie décontractée avec un plan vengeur parfaitement exécuté, il est aussi un témoin du contexte dans lequel il a été créé, et un divertissement génialement conçu par des artisans en pleine possession de leurs moyens.


James Mangold, autre figure mésestimée d’Hollywood, mais qui, lui, nous est contemporain (Cop Land, Walk the Line, Logan, Le Mans 66), a pu récemment dire sur Twitter :

“George Roy Hill : pourquoi le travail de ce brillant réalisateur n’est-il pas plus reconnu ? Les performances, le style assuré. Butch Cassidy & the Sundance Kid, L’Arnaque, La Castagne, Le Monde selon Garp, Abattoir 5, La Kermesse des Aigles, Deux copines, un séducteur et plus encore. Quelle carrière !”

Ce n’est pas ici qu’on dira le contraire ! (Re)voyez les films de George Roy Hill. Ça fait toujours plaisir de voir du cinéma bien foutu, avec ce qu’il faut de classe et de gouache pour laisser des acteurs et actrices évoluer de manière toujours magnétique. Un des grands cinéastes oubliés, ou en tant cas peu discutés, qui mériteraient bien plus d’attention.

Comments


bottom of page