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JACK REACHER (critique)

Adapté d'une série de romans très populaire aux États-Unis, Jack Reacher sort en 2012 avec un succès mitigé. Ce thriller politico-parano réussi, sous l'influence manifeste du cinéma des années 1970, marque le début d'une précieuse collaboration entre Tom Cruise et Christopher McQuarrie, puisque ce dernier réalisera par la suite quatre films de la saga Mission : Impossible !

Lorsqu'en 2010 Christopher McQuarrie est annoncé à la réalisation de Jack Reacher, il est surtout célèbre en tant que scénariste, spécialement sur les films de Bryan Singer -il a obtenu l'Oscar en 1996 pour Usual Suspects, et est scénariste et co-producteur de Walkyrie, déjà avec Tom Cruise. En revanche, il n'a alors réalisé qu'un seul long-métrage à la carrière très anecdotique (The Way of the Gun, en 2000). Cela paraît incroyable, tant Jack Reacher est une démonstration de force en terme de mise en scène, et ce dès sa mémorable séquence d'ouverture : huit minutes au cours desquelles on nous raconte un attentat (un sniper tire sur une foule à Pittsburgh, de façon apparemment aléatoire), puis l'enquête menée pour arriver à la capture de Jack Barr, le tireur présumé… le tout sans aucune ligne de dialogue !


Une fois arrêté, ce tireur demande à "voir Jack Reacher", mais est plongé dans le coma avant d'avoir pu lui parler, suite à une bagarre en prison. Reacher (interprété par Tom Cruise, donc), ancien policier militaire de l'armée américaine, est alors engagé par l'avocate de Jack Barr (Rosamund Pike, alors au "Pike" de sa carrière) pour l'aider à le défendre. Ses talents d'investigateur, et sa connaissance de Barr (qui avait été jugé pour des faits similaires survenus en Irak pendant la guerre), commencent à le faire douter de la culpabilité de ce suspect trop parfait… et soupçonner l'existence d'un complot d'une envergure bien plus large.


L'enquête qui s'en suivra est relativement classique dans son déroulé, mais néanmoins efficace et agréable à suivre. Le personnage de Jack Reacher s'inscrit dans la lignée des rôles de Clint Eastwood, une sorte de vigilante bad-ass (avec des répliques comme "You think I'm a hero? I'm not a hero. I'm a drifter with nothing to lose"), qui considère son sens de la morale/justice au-dessus des lois des hommes -la phrase d'accroche du film, "The law has limits. He does not.", annonçait la couleur ! Tom Cruise, également producteur du film, semble s'en donner à cœur joie dans la peau de ce personnage, assez proche de ceux qu'il a l'habitude d'incarner (Ethan Hunt, Maverick…), que ce soit pour son talent à se placer dans des situations dangereuses, son talent encore plus grand pour en réchapper dans des scènes de castagne récurrentes, ou son rapport aux femmes…

Le rôle lui offre également l'occasion de se prêter à son exercice favori : une grande scène de cascade, que Cruise interprète intégralement lui-même, en l'occurrence une longue course-poursuite en voiture. À ce sujet, McQuarrie ironisera :

"Le challenge de la plupart des poursuites en voiture est d'essayer de cacher le fait que ce n'est pas l'acteur qui conduit. Ici, c'était exactement le contraire. Nous devions trouver une manière de montrer que c'était toujours Tom qui conduisait, dans toutes les séquences de cascade !"

Il peut être amusant de le noter : malgré sa célébrité et sa carrière déjà éclatante, Tom Cruise a failli passer à côté du rôle en raison de sa taille jugée "trop petite" pour correspondre à celle du personnage Jack Reacher, ce dernier étant décrit dans la série de livres comme une espèce de géant. Si les fans ont réagi avec virulence à l'annonce du casting, l'auteur Lee Child a totalement validé ce choix, estimant que si la taille de Reacher dans les romans était une métaphore de sa force implacable, Cruise parvenait à incarner cette force à sa propre manière.


En dehors de Cruise et de Rosamund Pike, déjà cités, le film est porté par un casting de haute volée : Richard Jenkins (Six Feet Under, La Forme de l'eau…) David Oleyowo (Selma), l'encore débutant Jai Courtney (qu'on retrouvera plus tard dans Terminator Genisys ou les deux Suicide Squad), ou encore le génial vétéran Robert Duvall (80 ans à l'époque du tournage !) et le réalisateur Werner Herzog (qu'on a retrouvé depuis dans la première saison de The Mandalorian), qui joue une espèce de méchant de James Bond assez glaçant.

Formellement, le film est une réussite indiscutable. On ne peut que remarquer la photographie ultra-léchée signée Caleb Deschanel (directeur photo de L'Étoffe des Héros -excusez du peu !- ou de La Passion du Christ) ; ah, ce long plan incroyable du point de vue du viseur du tireur, toujours dans la scène d'ouverture ! Celle-ci est également bien valorisée par le montage très soigné, et qui s'autorise à laisser durer les plans, permettant au film de rester parfaitement lisible même dans ses scènes d'action les plus effrénées.

Enfin, on peut noter la musique du relativement peu connu Joe Kraemer (en dehors de sa composition ultérieure pour Mission : Impossible - Rogue Nation, par ailleurs ma préférée de la saga) qui accompagne le film avec brio, sans jamais chercher à s'imposer par-dessus tout. Et, fait assez rare à Hollywood pour être souligné, le film ménage par ailleurs de nombreux moments sans musique, au cours desquels le design sonore prend le dessus pour raconter l'histoire, rythmer le film ou créer de la tension même sans dialogues.


S'il est loin d'être un de ses films les plus connus, Jack Reacher s'avère donc un morceau de choix de la filmographie récente de Tom Cruise, un thriller d'une grande efficacité à côté duquel il serait dommage de passer.

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