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GRAND CORPS MALADE, BEN MAZUÉ & GAËL FAYE - ÉPHÉMÈRE (critique)

Dernière mise à jour : 12 oct. 2022

Quand trois lauréats de Victoires de la musique, amis de longue date et deux compositeurs phares se retrouvent une semaine dans un studio en Provence, cela donne l’EP Éphémère. Celui-ci nous donne-t-il envie d’avoir quelque chose de plus pérenne ? Noémie Contant vous dit tout sur PETTRI.

On vous avait déjà parlé de Ben Mazué sur PETTRI à l’occasion de la sortie de son superbe album Paradis. On n’avait jamais eu l’occasion de parler de Gaël Faye, pourtant aussi bon côté littérature avec Petit pays qu’en musique avec des morceaux comme Ma femme. Ni de Grand Corps Malade, malgré l’admiration qu’on a eue pour lui suite au morceau Des gens beaux, en soutien à Hoshi suite aux propos intolérables de Fabien Lecœuvre. Cet article va être l’occasion de faire d’une pierre trois coups puisque ces trois grands artistes ont eu la très bonne idée de se réunir dans un studio une semaine et voir ce qui en sortirait. Ils ont également la bonne idée d’amener avec eux Mosimann (oui, le Quentin Mosimann de la Star Ac), DJ qui a notamment collaboré avec Grand Corps Malade sur Mesdames, ainsi que Guillaume Poncelet, à qui on doit notamment la co-production de l’album La femme idéale de Ben Mazué et celle de l’album Pili-pili sur un croissant au beurre de Gaël Faye. Ressort donc de ce séjour l’EP Ephémère, sorti le 16 septembre 2022.


7 jours, 7 chansons. Simple, basique comme dirait l’autre. On est à la limite de l’album concept où l’on voit assez bien la trajectoire. La genèse, d’abord, avec le morceau d’ouverture, On a pris le temps. Histoire croisée de ces artistes n’ayant jamais chômé, tous par ailleurs ayant eu ou ayant une double vie (Ben Mazué ayant été médecin, Gaël Faye ayant rencontré un franc succès avec Petit pays, Grand Corps Malade ayant co-écrit et co-réalisé les films Patients et La Vie scolaire). Mais qui, pour une fois, prennent le temps de cette “pause, un répit, du repos pour [l’] esprit, comme une bulle au milieu du bruit”. Bulle qui prend d’autant plus de sens pour Ben Mazué, rappelant dans Sous mes paupières : “Sauf que ce matin j'y suis là dans l'pays de mon enfance, pour quelques jours sans l'avoir vraiment choisi. En Provence.” L’occasion d’une réflexion plus large sur les origines et les souvenirs d’enfance, que ce soit l’enfance banlieusarde de Grand Corps Malade ou celle vécue au Burundi puis en France de Gaël Faye, déjà au cœur de Petit pays.


Si on imagine assez bien la trajectoire de l’album et son contexte, il y a une chanson en particulier pour laquelle on aurait vraiment tout donné pour être une petite souris dans le studio lors de son écriture : Qui a kidnappé Benjamin Biolay ? Spoiler alert : c’est eux. Dans une chanson à l’humour noir inattendu, les trois se replongent dans la soirée des Victoires de la musique 2021 où Benjamin Biolay a effectivement remporté la Victoire de l’artiste masculin, face aux trois compères. Dans la réalité on peut imaginer que c’est le jeu et que ça va, d’autant que depuis chacun a remporté une victoire (Ben Mazué en 2022 pour le concert, Grand Corps Malade en 2021 pour la chanson originale - face à Biolay, l’honneur est sauf -, Gaël Faye en 2018 pour la révélation scène). Dans la fiction, Grand Corps Malade pique le trophée, invite Ben Mazué et Gaël Faye en pleine insomnie à 4h du mat qui, après avoir picolé, décident de rendre la Victoire à Biolay. Cela ne se passera pas comme prévu, Biolay appréciant moyennement la punchline de Mazué : “Eh tu sais pourquoi t’as gagné ? T’as gagné parce que t’as appelé ton album Grand Prix ! Tu vois moi le prochain je vais l’appeler Gros Lot”. 5 minutes 33 d’une histoire totalement délirante, avec une super instru et un phrasé entre slam et rap.


Ainsi qu’une parfaite transition vers La cause, entièrement portée par un sample de… La superbe, de ce même Biolay ! Une réflexion intéressante sur la question de l’engagement de l’artiste, d’autant plus que les trois n’ont pas forcément le même avis sur la question, perdu dans les injonctions contradictoires pour Grand Corps Malade, l’envie de parler uniquement de ce qu’il connaît pour Ben Mazué alors que Gaël Faye se demande “Qu'est-ce qu'on attend pour foutre le zbeul”. Et qui conclut par différentes citations autour de la notion d’artiste engagé.


Après ces morceaux et Besoin de rien qui imagine les trois compères attendre à un arrêt de bus en fredonnant, l’EP se conclut par Ephémère, très dépouillé, en guitare voix, quelques notes de piano et de trompettes, qu’on imagine bien chanté au coin du feu à l’issue de la semaine. Comme une petite berceuse avant de nous laisser faire de beaux rêves, qu’on espère sans Benjamin Biolay kidnappé dans un coffre de voiture.


Après cette écoute aux ambiances et thématiques variées, on n’a ainsi qu’une question en tête : quelqu’un a un bon plan Airbnb pour leur permettre de faire la suite ?

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