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BEN MAZUÉ - PARADIS (critique)

Dernière mise à jour : 25 oct. 2021

Un album de rupture qui ne soit pas totalement dévastateur ? Vous l’avez rêvé, Ben Mazué l’a fait avec Paradis !

On dit toujours qu’après une rupture importante, la première chose à faire c’est une nouvelle coupe de cheveux. Ben Mazué a décidé de faire les choses en grand en revenant, trois ans après La femme idéale, avec les cheveux longs et un tout nouvel album. Un tout nouveau divorce, aussi.

La femme idéale mettait déjà son mariage à l’honneur avec le morceau « Dix ans de nous » et son très explicite titre, mais aussi d’autres morceaux faisant état de doutes conjugaux, comme « La mer est calme » et son appréhension de la rupture, ou « J’attends » sur les soucis de couple. La suite, Ben Mazué nous la relate sur Paradis.

L’album s’ouvre sur le très clair « Tu m’auras tellement plu », chanson de rupture, certes, mais apaisée, ce qui est assez rare dans ce registre. Chaque personne qui a un jour connu une rupture d’un commun accord et sereine se reconnaîtra dans les paroles et dans les sentiments divers qui traversent le morceau.

« Divin exil » vient ensuite évoquer les évènements précédant la dite-rupture : un déménagement sur l’île de La Réunion, où par ailleurs les clips de l’album ont été tournés. Période pleine d’espoir et de renouveau, que le morceau suivant, « Nulle part », vient très vite doucher, en s’ouvrant par « Et voilà ce qu’elle m’a dit juste avant qu’elle se barre, si on n’y arrive pas au paradis on n’y arrivera nulle part ». On est ici un peu moins dans la sérénité du premier morceau mais plutôt dans les débuts de la rupture, ces débuts faits de solitude et de remords, illustrés par des arrangements musicaux plus lourds, plus sombres, et des paroles qui le sont aussi (« Moi j'en étais arrivé à de sales pensées, bleues et brunes, qui disaient que jamais, jamais je rendrai heureuse quelqu'une »).

Au fil du disque, la lumière revient : l’influence du divorce sur les enfants est évoquée sur « Mathis », du nom d’un des deux enfants du chanteur, un début de résignation et d’espoir se fait sur « Le cœur nous anime » (« Réjouissons-nous qu’encore le cœur nous anime et même de ses larmes qu’on éponge, y a des histoires très belles qui se terminent et d’autres pourries qui se prolongent »). La logistique des enfants s’organise sur le très beau « Semaine A / Semaine B », en duo avec Anaïde Rozam et enfin, en avant-dernier morceau, « Les jours heureux » reviennent (« Ça y'est je le sens j'ai envie à nouveau de voir les jours heureux qui se pointent »).

Certains morceaux de l’album s’éloignent également de cette thématique « rupture », comme pour nous faire respirer quelque peu : « Parents » évoque le choix de non-parentalité, ce qui reste un thème de morceau très rare et même quelque chose d’encore incompris dans la société alors que, comme Ben Mazué l’exprime, « on peut choisir sereinement de ne pas être parents ». Enfin, le morceau qui clôt le disque, « Pas très original », sous un fond de guitare acoustique douce et du spoken word au premier plan, ressemble à un pendant musical de l’épisode « Je suis comme tout le monde » de Bref., énumérant de nombreuses actions ou positions qui peuvent être considérées comme « pas très originales » (« Je défendrai toujours la sécurité sociale, le coup d'boule de Zidane, l'humain dans tout salaud qui sommeille, que le monde a éteint. J'aime quand on se dit merci, pardon, bravo. J'aime quand on crée un lien et quand ça s'éclaircit »).

Malgré le contexte qui peut sembler sombre, déprimant, c’est un album sensible, honnête et lumineux que nous propose Ben Mazué, à l’opposé de certains disques de rupture où émane la souffrance (For Emma, Forever Ago de Bon Iver en tête). Il y prouve qu’il peut y avoir quelque chose de libérateur dans la rupture amoureuse et que celle-ci ne vient pas forcément remettre en cause les moments heureux passés.

C’est ainsi à nouveau un disque abouti, très bien produit et écrit que propose Ben Mazué, nommé dans la catégorie Album aux prochaines Victoires de la musique en février. Visiblement, la coupe de cheveux ne change rien au talent.

Crédit photo : Romain Philippon

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