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Jofrey La Rosa

TROPIC THUNDER (critique)

Le quatrième long-métrage de Ben Stiller est une pure comédie satirique du milieu qu’il connaît le mieux : celui du show-business, et plus particulièrement celui d’Hollywood. Dans Tropic Thunder (ou Tonnerre sous les tropiques en VF), il tire sur tout ce qui fait l’industrie et ses travers. Let’s go full retarded !

Dès les premières secondes, Stiller assume son format : en guise de (fausses) bandes-annonces à son long-métrage, il en profite pour présenter ses protagonistes. Tugg Speedman (lui-même), star d’une franchise de films d’action sur le déclin ; Kirk Lazarus (Robert Downey Jr), primé par cinq fois à l’Oscar du meilleur acteur ; Jeff Portnoy (Jack Black), comédien qui interprète tous les rôles type Eddie Murphy ; et Alpa Chino (Brandon T. Jackson), gangsta-rapper dans un clip on-ne-peut-plus cliché. Et il le fait avec une verve et un entrain assez fous : les bandes-annonces s'enchaînent comme autant de sommités de sketchs. Scorcher, la franchise de Tugg, est un mix entre Chuck Norris avec une once de post-apo teubé (avec une belle réf à Hard Boiled de John Woo avec Chow Yun-fat). La scène de The Fatties : Fart 2 de Portnoy est un amoncellement excessif de blagues de pets over-the-top, aussi horrible qu’hilarante. Mais le réel génie vient bien de Satan’s Alley, drame monastique avec Lazarus et Tobey Maguire, qui interprètent deux moines qui goûtent au fruit défendu de l’homosexualité, dans un sketch décalé pour les mémoires. Enfant du Saturday Night Live (il a même fait partie de l’aventure durant 4 émissions seulement en 1989, avant d’aller créer son propre Ben Stiller Show), il a probablement signé leur meilleur sketch non officiel avec Satan’s Alley. Satan’s Alley, les gars ! Rendez-vous compte ! Rien que le titre, c’est du génie.


Mais bref, passons. Que raconte Tropic Thunder ? Déjà, voyez la director’s cut, plus longue de 15 minutes et mieux rythmée. Tous ces acteurs, adjoints du nouveau venu Kevin Sandusky (Jay Baruchel), sont parachutés dans un film de guerre épique sur le Vietnam, tiré des mémoires de mémoires d’un Nick Nolte très… Nick Nolte, un crochet à la main en plus. Pour diriger tous ces egos surdimensionnés et accumulés, le réalisateur anglais inexpérimenté Damien Cockburn (Steve Coogan) est partiellement inspiré de Richard Stanley et du tournage de L'île du Docteur Moreau (la version avec Brando et Kilmer). Très vite donc, il va perdre le contrôle de cette production, gérée à distance par l’inénarrable Les Grossman, producteur tout puissant, chauve et bedonnant interprété par… Tom Cruise. Oui oui. Il n’y avait que Ben Stiller pour convaincre Tom Cruise de faire de telles idioties devant sa caméra. Je vous conseille en passant leur sketch réalisé pour la sortie de Mission: Impossible 2.

Secondé par un Bill Hader comme toujours génial, Cruise en fait des caisses dans le style producteur irascible inspiré de Scott Rudin (collaborateur régulier de Stiller), jusqu’à danser sur le Get Back de Ludacris, dans un générique de fin où il est simplement impossible de regarder tellement on est plié en deux. Ajoutez à tout ce beau monde un Danny McBride au meilleur de sa forme, un Matthew McConaughey en pleine renaissance artistique et une multitude de caméos du milieu, Tropic Thunder a tout du coup de génie comique.


Co-écrit par Stiller, Justin Theroux (oui oui, l’acteur de The Leftovers) et Etan Cohen (pas celui auquel vous pensez, le H n’est pas au bon endroit), Tropic Thunder assume son côté ultra-satirique avec une décomplexion incroyable, dans une comédie rare et précieuse, aussi drôle que foncièrement intelligente. La dose d’auto-dérision de Stiller à l’œuvre impressionne (enfin quand on peut voir l’écran derrière les larmes de fous rires), pour finalement nous livrer une comédie pour les millénaires. Et en plus, le film est beau et stylé ! Stiller s’adjoint les services de John Toll, chef opérateur de La Ligne Rouge et de Almost Famous, pour un rendu poisseux et limpide, où chaque plan sublime la vanne d’orfèvre qu’on nous impose, à un rythme beaucoup trop soutenu pour ne pas faire fonctionner ses abdos et ses zygomatiques. Que dire, mis à part que Tropic Thunder est un chef-d’œuvre de comédie, que l'abattage de ses comédiens et l’écriture dingues rendent inoubliable ? Ah oui, voir Robert Downey Jr avec une blackface, ça n’a pas de prix. Parce que son personnage, adepte de la méthode Actor’s Studio, se fait pigmenter la peau pour interpréter un Afro-américain. Oui… du génie je vous dis.


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