Après The Mandalorian, The Book of Boba Fett et Obi-Wan Kenobi, Andor est la nouvelle série live issue de l’univers Star Wars pour la plateforme Disney+. Une réussite ou encore un constat du raz-le-bol de trop-plein proposé par Lucasfilm depuis le rachat de Disney il y a maintenant dix ans ? La réponse est évidemment sur PETTRI.
Autant le dire de but en blanc. J’aime bien Rogue One, mais pas autant que je l’aurais aimé. En l’état, je trouve que ça fonctionne bien, mais ça aurait dû être la meilleure entrée de l’univers Star Wars, purement et simplement. Et ça n’est évidemment pas le cas. Andor est donc un prequel à ce film-unitaire, qui se situait juste avant A New Hope, avec le groupe de rebelles qui ont permis à Leia d’acquérir les plans de la Death Star. Andor c’est donc le prequel du prequel. Mais jusqu’où ira-t-on dans ces poupées russes narratives ?
Dans Rogue One, on découvrait entre autres Cassian Andor, un espion et assassin qui menait le groupe de l'Alliance Rebelle vers une mission où ils finiront tous par mourir. Le film avait essuyé tout un tas de rebondissements créatifs en coulisses, qui ont conduit Tony Gilroy à écrire et superviser les reshoots extensifs du film des mains de Gareth Edwards (Godzilla). Et lorsqu’il a été question de produire un spin-off centré sur Cassian, c’est d’abord le scénariste et réalisateur Jared Bush (Zootopie, Moana, Encanto) qui a signé l’écriture d’un pilote et d’une bible pour la série. C’est ensuite Stephen Schiff (The Americans) qui a repris les rênes, avant que Tony Gilroy revienne sauver les meubles pour Disney : il showrunnera l'ensemble des deux saisons qui composeront au final Andor. Diego Luna revient évidemment, accompagné cette fois de Stellan Skarsgård, Genevieve O’Reilly, Kyle Soller et Andy Serkis.
Après les déceptions qu’ont été pour moi The Mandalorian et Obi-Wan Kenobi, ainsi que la purge innommable consacrée à Boba Fett, je dois dire que j’en avais un peu raz la casquette de Star Wars. Je ne pensais jamais dire ça puisque une bonne partie de mon enfance a été guidée par mon amour pour la saga de George Lucas, mais - il faut le dire - la rareté rimait aussi avec qualité. Je n’attendais donc rien d’Andor, et pire, y allais à reculons. Et j’ai eu tort. Andor est en train de prouver à tout le monde, avec calme et précision, ce que peut être Star Wars, loin des sabres-lasers et autres inclinaisons nostalgico-morbides aux personnages principaux du lore. Seuls quelques personnages secondaires, comme Yularen, un colonel de l’Empire étant surtout apparu dans Clone Wars, le Saw Gerrera de Forest Whitaker (apparu dans Rogue One) et Mon Mothma, grande figure de la Rébellion, viennent montrer le bout de leur nez, à plus ou moins grande échelle. Pas de mention de Jedi ni de Sith, ni même des gens sensibles à la Force, purement et simplement des gens avec des convictions, qui les défendent corps et âme, avec les armes qui sont les leurs.
Dans Andor, on suit donc principalement Cassian, alors qu’il se trouve poursuivi par l’Empire après avoir abattu deux gardes impériaux en légitime défense, dans une chasse-à-l’homme bien menée, qui prend juste le lore de Star Wars, pour en faire un récit qui mute de plus en plus dans une série d’espionnage et de guerre, dans un contexte certes fantastique, mais jamais diluée par des détours enfantins. Oui, les meurtres se déroulent souvent hors-champ, mais Gilroy fait ce qu’il peut avec les limites de son médium (une série Star Wars sur Disney+ se doit de rester tous publics après tout). La série est donc âpre, violente, intense, douée d’une véritable raison d’être libertaire, qui s’adapte à son sujet. Son personnage-titre gagne en profondeur, insoupçonnée jusqu’alors, à la vue de sa platitude dans Rogue One. Ici, le personnage de Diego Luna, plutôt mutique mais charismatique, trouve une richesse grâce à des flashbacks assez beaux et originaux, ainsi que par ses relations humaines, desquelles découlent son désir de rébellion face au système en place.
Et dès lors, on peut comprendre la position du faiseur Tony Gilroy, scénariste de talent s’étant d’abord attelé à des rewrites variées, avant de trouver la formule gagnante avec les films Jason Bourne, puis de passer à la réalisation avec Michael Clayton, Duplicity et le spin-off The Bourne Legacy. Il viendra donc finir Rogue One des mains de Gareth Edwards on l’a vu, avant de prendre les rênes d’Andor. Il y imposera son entourage : Dan et John Gilroy (ses frères, respectivement scénariste et monteur) et Beau Willimon, pour qui il était consultant sur son chef-d’œuvre House of Cards. À la réalisation, il confère les pouvoirs à trois faiseurs britanniques doués : Toby Haynes (Doctor Who, Sherlock, Black Mirror), Benjamin Caron (The Crown, Sharper) et Susanna White (Parade’s End, Generation Kill). C’est donc adjoint de proches collaborateurs que Tony Gilroy vient démonter le mythe Star Wars, qu’il aborde à sa sauce, en tant que profane autoproclamé, et qu’il nourrit d’une vision salvatrice. Le parallèle entre l’artiste et le personnage principal est alors aisé : d’abord réticent, il monte toute une équipe, avant d’inspirer davantage de monde à une secousse du système. Dès lors, le choix du génial compositeur Nicholas Britell (If Beale Street Could Talk, Succession) est aussi enthousiasmant que déroutant. On s’est habitué aux grandes partitions de John Williams, et celles moins grandioses mais réussies de Michael Giacchino ou Ludwig Göransson, mais en terme de musique originale, peu de choses marquantes sur Disney+ : Joseph Shirley et Natalie Holt n’ont pas brillé sur les dernières séries Star Wars de la plateforme. Mais à peine les premières notes retentissent que la partition de Britell s’annonce plus brillante - et surtout marquante. En accord avec ce qui se passe à l’écran, toujours léchée et tangible, la musique virevolte, pour atteindre l’essentiel devant un Star Wars : l’émotion et l’épique.
Le souffle soigné de chaque épisode, chaque arc narratif, chaque personnage de cette première saison d’Andor étonne et enthousiasme. Pas une seconde, on ne s’ennuie. On a l’impression d’assister à une réelle série, avec ses protagonistes, ses antagonistes, ses enjeux et ses rebondissements, dans un bel écrin là encore élégant. Ici, exit le Volume (cet écran LED connecté utilisé à tort et à travers depuis The Mandalorian) pour de vrais décors en dur, augmentés par des CGI. Le rendu est bien plus appréciable, palpable, tangible. Les intrigues politiques et dramatiques s’en retrouvent encore plus tendues, et non pas diminuées par un système préfabriqué. Ceci étant dit, les effets numériques sont tout de même présents – et sont très réussis. La mise en scène est sobre et capable, tout comme l’écriture, aussi intense qu’émouvante par moments. La construction en mini-arcs, résolus en 3-4 épisodes, redonnent du jus et du mouvement à un récit toujours haletant, jamais redondant. Bref, Andor m’a ravi du début à la fin, et s’avère à mon avis la meilleure création hors saga Skywalker de l’univers. Pas moins. C’est plus que chaudement recommandé.
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