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LE LYCÉEN (critique)

Nouveau long-métrage de Christophe Honoré, Le Lycéen est un film sur le deuil et le passage à l’âge adulte. Une parenthèse désenchantée réussie pour Pauline Lecocq qui vous en parle sur PETTRI.

Synospis : Lucas a 17 ans quand soudain son adolescence vole en éclats. Avec l’aide de son frère, monté à Paris, et de sa mère, avec qui il vit désormais seul, il va devoir lutter pour apprendre à espérer et aimer de nouveau.


« On n’est pas sérieux quand on a 17 ans » écrivait Rimbaud… Rien de plus faux au premier abord pour Lucas qui doit faire face à un événement tragique. Pourtant, avec son insouciance toute adolescente alternée avec des moments de pur désespoir, il commence son deuil. Entre Chambéry et Paris, la province et la capitale, Lucas fait l’expérience de quelques jours d’échappatoire dans la Ville Lumière, comme une parenthèse à la fois enchantée et désenchantée, faites de questionnements et de découvertes.

Comme d’habitude chez le réalisateur, la légèreté et la gravité se mêlent avec grâce ce qui en fait un long-métrage constamment sur le fil en termes d’émotions. Un film désespéré ? Pas tout à fait, mais où le désespoir surgit parfois brutalement sous une surface légère. Toujours extrêmement bien écrit en termes de scénario et de dialogues (Honoré est également écrivain et cela se sent), la mise en scène est volontairement caméra à l’épaule, joue des flous, adopte une photographie désaturée, notamment un mélange gris-bleu dans les scènes à Paris, palette qu’il avait déjà utilisée dans Les Chansons d’amour (2007). Ici, Le Lycéen joue d’un dispositif narratif étonnant : en effet, Lucas et sa mère reviennent sur les deux dernières semaines face caméra. L’histoire est donc construite en flashbacks et la mise en scène et l’écriture proposent un lien fort entre ce qui est raconté, ce qui est montré, et les mots qu’on peut mettre sur des émotions et des actions avec du recul. Comme une chronique sur des jours importants qui définissent une vie d’adulte, tout cela avec une drôlerie mêlée à la tristesse, et une tendresse infinie pour ses personnages.

Remarqué dans T’as pécho ?, Paul Kircher (fils des comédien.ne.s Irène Jacob Jérôme Kircher) incarne Lucas de façon lumineuse et désespérée. Avec sa nonchalance à la fois physique et vocal, tout en étant une boule d’émotions, il est une vraie révélation et porte le long-métrage sur ses épaules. A ses côtés, Vincent Lacoste est parfait en grand frère responsable (troisième film avec Honoré après Plaire, aimer et courir vite et Chambre 212) et Juliette Binoche est impeccable en mère éplorée. Le nouveau venu Erwan Kepoa Falé est aussi très bien en colocataire doux et les pieds sur terre.

Dans l’œuvre du réalisateur, la bande originale est toujours aux petits oignons avec une sélection de chansons marquantes, quand elles ne sont pas écrites par son comparse Alex Beaupain. Dans ce film-ci, on retient notamment le morceau vintage « Irrésistiblement » de Sylvie Vartan. Mais chez le cinéaste, il y a toujours un morceau mélancolique qui vient représenter l’émotion du film. C’était, par exemple, « Cambodia » de Kim Wilde dans le beau Dans Paris (2006), avec Louis Garrel et Romain Duris. Ici, il s’agit de « Electricity » d’Orchestral Manœuvres in the Dark (OMD), chanson chère à la famille à l’écran. Toujours dans cette idée d’amener de la légèreté dans la gravité. Et puis, la musique peut aussi être salvatrice (et par extension l'art).

Christophe Honoré dédie son film à son père, on peut donc penser qu’il y a une part d’autobiographie dans l’histoire qu’il nous présente. Attention toutefois aux âmes sensibles car le long-métrage prend un virage dramatique qui ne laisse pas indifférent. Film sur le deuil, les liens familiaux et la résilience, à la fois chronique et parenthèse mélancolique sur l’adolescence et le passage à l’âge adulte, Le Lycéen vaut le détour.


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